29 Décembre 2022
Il a fallu plusieurs semaines à Aude pour interpréter et enregistrer Ti-Prince. Un long travail patient, porté par l'envie de donner la parole au texte. Le résultat est formidable : près de trois heures d'émotion vocale, trois heures d'immersion sensible dans la vie de Ti-Prince. Disponible aujourd'hui sur YouTube.
Je ne remercierai jamais assez Aude pour ce travail généreux. Merci aussi à ses complices de studio qui lui ont apporté leur expertise professionnelle : Valérie Gravinay et son frère Christian.
Désormais Ti-prince se lit avec les oreilles ICI.
Il se lit aussi avec les yeux, bien sûr. Ti-Prince est disponible dans toutes les bonnes librairies et hyper-marchés des Antilles-Guyane, ainsi que sur commande dans les autres librairies de France ; possibilité également de commander l'ouvrage sur les principaux sites de vente en ligne de livres type fnac.com, placedeslibraires.fr, cultura.com, decitre.com... ou encore sur amazon.
Extrait de Ti-Prince :
Je n’aurais pas dû vivre. Je n’aurais pas dû survivre à ma naissance. J’étais trop petit, trop flasque, trop fragile. J’aurais dû mourir dans le ventre de ma mère. Ou quelques jours plus tard, d’épuisement. De faim peut-être, ou d’un trop long sommeil. J’aurais dû rester dans les coulisses de la vie et attendre simplement que la nature me reprenne. Laisser la parenthèse se refermer avant que rien ne commence… C’était la seule chose à faire.
Je suis arrivé dans le monde sans un cri, sans promesse, comme un petit bout de viande inerte échappé par hasard des entrailles maternelles. Je suis entré dans la vie sans avoir l’intention d’y rester. Je n’avais rien à y faire, j’étais sans arme, incapable d’illusion. Mes sens étaient vides, mon cœur battait à peine. Mon corps flottait d’une sinistre mollesse. J’étais plus que nu, entièrement dépossédé, absolument inutile. Mais bien que dépourvu de tout, je n’étais pas seul. Elle était là, dans mon sillage, petite et presque invisible, accrochée à moi comme à un radeau de survie. Tellement muette, tellement silencieuse, tellement infime. Comment pouvais-je hériter d’une faiblesse supérieure à la mienne ? Une faiblesse immense que j’accueillais pourtant, malgré moi, dans mon cœur mal animé.
« Désolé, madame » avait juste dit le docteur en m’enveloppant de ses mains humides.
Non, je n’aurais pas dû vivre. Je n’étais pas fait pour ça. Mais ma mère en avait décidé autrement. Elle avait déjà eu sept enfants, tous bien vivants. Et elle ne comptait pas s’arrêter en si bon chemin. Le huitième survivra. Il grandira comme les autres. Coûte que coûte. Il absorbera ses repas à la seringue, au coton ou au doigt mouillé, même si chaque ration devait entamer sa chair maternelle, sa patience de femme. Ma mère avait décidé que je vivrais, et personne ne pouvait contrarier les décisions de ma mère. J’étais devenu son obsession absolue, une obsession aveuglante qui lui laissait croire que j’étais seul...