L’île et ses os

Ce poème nous vient de Guadeloupe. Il est signé Christian Block de Friberg

On a trouvé des os, ils sont venus par l'eau ; En pirogues, par bateaux. Enterrés en cette terre tropicale qui se dessine en arc avant les Amériques.

L’antillais, quel qu’il soit, y a creusé son trou et trouvé le trépas.

Plongé dans les Abymes, l'archéologue fouineur a découvert des tombes, des sépultures qui ont connues Mille ans de solitude !

On a trouvé des os...il nous manque les mots.

Quels dieux invoquaient-ils ? En s'enfonçant en terre, pensaient-ils aux cieux ?

Étaient-ils nés ici ou sur les continents ?

Accroupis sous la Terre, ils ignoraient sans doute qu'elle était ronde et bleue. L'idée du nouveau monde n'était pas encore née et chacun dans son trou regardait son nombril en mettant son monde au centre de la mappemonde.

L’île aux belles eaux craignait plus les "grands vents " que "le déluge" qui pourtant s'abattait sur elle tous les ans.

Des "vagues inconnues effacèrent leurs pas" (Saint John Perse), il reste des tessons, "des beaux os ...endormis" (Victor Hugo ?) et un imaginaire avec des roi des sources (ouassous), des roches gravées, des pierres à trois pointes énigmatiques et l'amour de la Nature que l'on semble oublier aujourd'hui.

La Terre arasée... on déplacera les os... où iront-ils stagner ?

Les os sont fatigués.

Pourront-ils reposer enfin un jour en Paix ?

Notre Histoire mêlée finira-t-elle dans une fosse commune où les os entremêleront en toute fraternité ?

Souhaitons que les mémoires soient enfin apaisées en cette île aux belles eaux où les peaux sur les os sont couleurs mélangées. Mandela l'évoqua ; l'arc en montant au ciel semble lui donner raison... l'Homme est d'une seule Nation, Homo en est son nom !

Respectons tous les os sur cette "île aux belles eaux".

Christian Block de Friberg